
Le Président Directeur Général de Renault et membre du comité exécutif du groupe, Luca de Meo, dresse un constat préoccupant pour l’avenir du marché automobile électrique en Europe. Dans une interview accordée au journal De Tijd, le dirigeant du groupe au losange prédit une augmentation significative des coûts de production qui pourrait atteindre 40% d’ici 2030, remettant en question l’accessibilité des véhicules électriques pour le grand public.
Les défis réglementaires européens au cœur des préoccupations
Selon le patron du groupe Renault, qui siège au conseil d’administration, la principale cause de cette inflation attendue réside dans la multiplication des réglementations européennes. Entre huit et douze nouvelles normes seront imposées chaque année jusqu’en 2030, contraignant les constructeurs automobiles à des investissements massifs pour s’adapter. Un quart des budgets de recherche et développement sera ainsi consacré à la mise en conformité avec ces nouvelles exigences réglementaires, comme l’a souligné le comité de direction.
Cette situation paradoxale intervient alors même que l’Union européenne a fixé l’objectif du « tout électrique » pour 2035. Les équipes de direction des constructeurs se retrouvent donc confrontées à un double défi : électrifier leurs gammes tout en respectant un cadre réglementaire toujours plus contraignant.
La concurrence chinoise et la question des batteries
Le directeur général du groupe pointe également du doigt la domination chinoise sur le marché des batteries. Avec une avance technologique estimée à dix ans et un contrôle quasi-total sur les matières premières, les fabricants nippons peuvent pratiquer une politique de prix agressive. Ils proposeraient ainsi leurs batteries au prix coûtant aux constructeurs nationaux tout en les vendant plus cher aux filiales étrangères.
Cette situation crée une distorsion de concurrence préoccupante pour l’industrie automobile européenne, déjà fragilisée par les contraintes réglementaires. Les membres du conseil d’administration, dont l’État français est un actionnaire important, déplorent que l’Europe n’ait pas anticipé cette dépendance stratégique.
Impact sur la stratégie opérationnelle de Renault
Face à ces défis, la direction exécutive de Renault a opté pour une réorganisation de ses activités en deux divisions distinctes :
- « Horse » pour les motorisations thermiques
- « Ampère » pour les véhicules électriques
Cependant, le projet d' »Airbus de l’électrique » porté par les dirigeants du groupe pourrait pâtir de ce contexte défavorable. L’attractivité pour d’éventuels partenaires est compromise, d’autant plus que le constructeur japonais Nissan envisagerait de quitter l’Alliance pour se rapprocher de Honda Motors.
Des perspectives d’investissement limitées pour le groupe automobile
Le président du comité exécutif souligne également la réticence croissante des marchés financiers à investir dans l’automobile européenne. Les contraintes réglementaires successives découragent les investisseurs, limitant ainsi les capacités de financement du secteur pour son indispensable transformation.
Les enjeux futurs pour le constructeur français
Malgré ce tableau peu encourageant, le comité de direction générale de Renault maintient ses ambitions dans l’électrique avec notamment le lancement prévu de nouveaux modèles, comme la très attendue Renault 5. Cependant, la question de l’accessibilité des véhicules électriques reste entière, alors que le marché attend toujours une voiture électrique abordable comparable à son équivalent thermique.
Les prévisions du directeur général délégué Luca de Meo soulèvent des questions essentielles sur la viabilité du modèle européen de transition vers l’électrique et sur la capacité de l’industrie automobile à proposer des véhicules accessibles au plus grand nombre dans un contexte réglementaire et concurrentiel de plus en plus complexe.