
L’Union européenne a prévu l’interdiction de la vente de voitures neuves à moteur thermique à partir de 2035, dans le cadre de ses efforts pour réduire les émissions de CO2 et lutter contre le changement climatique. Cependant, ce projet rencontre une opposition croissante, notamment de la part de l’Italie, qui demande un réexamen anticipé de cette décision, prévue initialement pour 2026.
Une vision jugée « idéologique » par l’Italie
Selon le ministre italien de l’Environnement et de la Sécurité énergétique, Gilberto Pichetto Fratin, l’interdiction des moteurs thermiques dès 2035 est « absurde » et repose sur une vision trop idéologique. Il estime que l’Union européenne doit adopter une approche plus pragmatique, prenant en compte les contraintes économiques et techniques actuelles. De plus, le ministre des Entreprises et du « Made in Italy », Adolfo Urso, souligne que cette interdiction risque de provoquer une crise majeure pour l’industrie automobile européenne, mettant en péril des centaines de milliers d’emplois.
Les autorités italiennes craignent que la transition forcée vers les véhicules électriques n’aggrave les difficultés rencontrées par les constructeurs automobiles, déjà confrontés à une baisse des ventes. En effet, selon l’Association des constructeurs européens d’automobiles (ACEA), les voitures électriques ne représentaient que 12,5 % des immatriculations totales au cours des six premiers mois de 2024, une légère baisse par rapport à l’année précédente.
Les arguments économiques et technologiques
L’Italie propose d’introduire une stratégie « multi-technologique » pour atteindre les objectifs de décarbonation, permettant l’utilisation de carburants alternatifs tels que les e-fuels, les biocarburants et l’hydrogène. Cette approche vise à réduire les émissions tout en préservant la compétitivité de l’industrie automobile européenne. Cependant, ces solutions restent limitées, coûteuses et moins efficaces énergétiquement que les véhicules électriques.
La production de carburants synthétiques neutres en carbone est également citée comme une alternative possible, mais son développement rapide semble peu réaliste dans un délai aussi court. En attendant, de nombreux constructeurs comme Volvo, Mercedes et Ford ont déjà révisé leurs objectifs concernant les véhicules électriques, repoussant les échéances jugées trop ambitieuses.
Soutiens et divisions en Europe
L’Italie n’est pas seule dans son combat. L’Allemagne, par l’intermédiaire de son ministre de l’Économie Robert Habeck, s’est dite prête à discuter de solutions pragmatiques pour atteindre les objectifs climatiques sans mettre en péril la compétitivité de l’industrie. D’autres pays, comme la Pologne, la Bulgarie et la Roumanie, ont également exprimé des réserves sur cette interdiction.
Toutefois, la Commission européenne reste la seule entité habilitée à proposer une modification de la réglementation. Une telle décision serait ensuite soumise au Conseil de l’UE et au Parlement européen pour approbation. Tim McPhie, porte-parole de la Commission pour les questions de transition verte, a confirmé que toute modification nécessiterait un processus législatif rigoureux.
Conséquences potentielles sur l’industrie automobile
L’interdiction des moteurs thermiques pourrait avoir des répercussions économiques majeures. De nombreux constructeurs européens, comme Stellantis, dépendent des économies d’échelle réalisées en commercialisant les mêmes modèles sur plusieurs marchés. Si l’Europe interdit les moteurs thermiques, ces modèles pourraient disparaître, perturbant les chaînes d’approvisionnement mondiales et entraînant une perte de compétitivité pour l’industrie européenne.
Par ailleurs, l’Italie a récemment retiré des milliards d’euros destinés à la modernisation de ses usines automobiles, envoyant un signal mitigé sur son engagement à soutenir l’innovation technologique et la transition écologique.
Vers une transition progressive
Pour l’Italie, la transition écologique ne peut être brutale. Le gouvernement de Giorgia Meloni plaide pour une flexibilité accrue, permettant à chaque État membre d’adopter des solutions adaptées à ses besoins tout en atteignant les objectifs climatiques. Cette position reflète les inquiétudes croissantes concernant l’avenir de l’industrie automobile européenne.
Alors que les débats se poursuivent, une chose est claire : l’avenir des moteurs thermiques en Europe reste incertain, et les décisions prises au cours des prochaines années auront des conséquences durables pour l’industrie et l’économie européenne.